Quand Gustave Caillebotte arrive au Cercle de la Voile de Paris en décembre 1878, il découvre les efforts, couronnés de succès, entrepris par les membres du Conseil depuis plusieurs années.
Soient: la médaille obtenue lors de l’Exposition Universelle pour l’organisation des régates qui trône dans la vitrine du bureau au 11 rue Saint-Lazare; le mesurage au tonneau des bateaux, un nouveau règlement pour les compétitions de bateaux à vapeur et les conférences des mardis d’hiver qui attirent de plus en plus d’amateurs.
Lucien Môre, le président d’alors se retire et une nouvelle équipe entraînée par Marcel Houssay est élue.
Émile Michelet est nommé vice-président, tout comme Gustave qui à peine admis au Cercle, remplace son ami Joseph Milon, peintre de marine à ce poste.
Michelet est propriétaire du petit clipper Rubis, Caillebotte d’Iris.
Leurs nouveaux statuts les font choisir de nouveaux bateaux. Chez Texier, le chantier naval du Petit-Gennevilliers, ils commandent Inès pour l’un et Turquoise pour l’autre. Ce sont de grands clippers, dits houaris à dérive, modèles vantés par leur ancien président, monsieur Môre.
Inès sera mise à l’eau la première, suivie de Turquoise. L’une vermillon, l’autre bleu cyan, couleurs complémentaires, comme Gustave et Émile, différents de caractères, et intrépides concurrents sur l’eau.

Émile avait aménagé son bateau pour pouvoir emmener ses enfants régater en Normandie ou à Argenteuil.
Au contraire de Gustave qui changeait de bateau à chaque saison, améliorant les lignes pour progresser et innover, Émile, lui, a conservé son bateau le plus longtemps possible. Un seul changement en 1888, un petit tour chez Texier pour allonger la coque. Soit un mètre à l’étrave désormais en guibre, ainsi qu’une voûte à l’arrière. Un dessin plus dans l’air du temps.

Émile était réputé excellent professeur. Léon, Gaston et Albert ont bien appliqué ses leçons. On les retrouve au palmarès des grandes compétitions du CVP, One Ton Cup et Jeux Olympiques.
Albert, le benjamin, sera en 1924 le représentant français dans l’épreuve de voile en solitaire.
La plus enthousiaste de tous est sans doute Lucie, l’une des filles d’Émile, qui les accompagnaient et a navigué le plus longtemps avec son père.

Gustave Caillebotte a réalisé le portrait de Turquoise. Élégante au mouillage sur le bassin d’Argenteuil.
Il est vraisemblablement que ce soit elle, le modèle de « En bateau sur la Seine » peint par Gustave en 1881.