« Réclamation de Mr Verbrugghe contre le Condor et celle de Mr Caillebotte contre le Pierrot.
1° Le Pierrot étant près de terre, il réclame le virage au Condor. Ce dernier n’ayant pas viré assez à temps, l’homme de barre est touché par le beaupré.
2° Sitôt le virage demandé, le Condor vire et se remet en route. Le Pierrot laisse arriver et touche un homme.
Entendu qu’il résulte des dépositions des parties que le Condor n’a pas viré assez à temps, ce dernier est mis hors de course. » Émile Jeanfontaine, le 4 juin 1880.
Le jury des courses avait statué et Martial Caillebotte avait vu s’envoler son prix d’honneur.
Parce qu’il s’agissait bien de Martial qui conduisait Condor, ce 30 mai 1880, lors des Régates Internationales du Cercle de la Voile. Cette fameuse régate qui avait fait couler beaucoup d’encre.
L’audace des voiles en soie, la chatte héraldique et dorée du pavillon du bateau, puis la victoire de Condor avait enflammé la presse.
Si Le Yacht relatait sérieusement le compte-rendu d’une magnifique course qui ferait époque dans les annales du Cercle de la Voile, le rédacteur du Gil Blas s’amusait des cris des belles dames scandalisées par la coïncidence entre la minette jaune du drapeau et le con d’or, patronyme du bateau.
En 1880, l’annuaire du CVP affichait pour la première fois des pavillons de yachts. Ceux-ci, arborés pendant les régates, permettaient de reconnaître les bateaux quand ils étaient nombreux.
Parmi ces premiers dessins colorés, apparaît donc le chat jaune sur fond bleu pour Condor tandis que Gustave Caillebotte avait choisi pour Inès les couleurs de la France posées en diagonale.
Le chat ne fera qu’une apparition dans l’annuaire du Cercle. L’année suivante, les pavillons de propriétaires ont remplacé ceux des bateaux. Pour Martial, une étoile a pris la place du chat.
Construit aux chantiers Texier du Petit-Gennevilliers, Condor a été le clipper de l’extrême. 96 mètres carrés de toile, 8,20m de longueur de pont pour 7,40m de bout-dehors, le dériveur impressionnait.
Après quelques ajustements en 1882, il est devenu le plus rapide du bassin parisien.
Un peu plus tard, les Caillebotte l’ont vendu à leur ami Maurice Godillot et le bateau a poursuivi brillamment sa carrière à Nantes et Pornic.