Que de belles heures j’ai passées avec Manet sur ce petit bateau ! Il y a fait mon portrait. J’y ai fait celui de sa femme et le sien. Ces beaux moments, avec leurs illusions, leur enthousiasme, leur ferveur, ne devraient jamais finir ». Claude Monet.
Lorsque la lumière était belle sur la Seine, il n’était pas rare de voir une drôle de barque cabanée, à l’ancre, au milieu des bateaux au mouillage ou au détour du petit-bras du fleuve. À la manière de d’Aubigny, Claude Monet en avait fait son atelier. Selon l’heure, il accueillait à bord Camille et leur fils, ses amis peintres ou personne, pour mieux observer l’eau et ses vibrations ou choisir le meilleur angle de vue.
Le bateau était atypique, nul autre dans les environs. Une embarcation insolite parmi les canots des pêcheurs et les clippers du Cercle de la Voile dont Monet avait fait brièvement partie entre 1862 et 1864.
À l’occasion des 150 ans de la naissance de Monet, (1840), la ville d’Argenteuil avait décidé de reconstruire ce bateau et le chantier du Guip avait été choisi.
Pour mon ami Paul patron du chantier à l’époque, une enquête s’était ouverte, où et comment avait été réalisée la construction originale ?
Chez Texier au Petit-Gennevilliers? Peu probable, la spécialité du chantier étant, yachts et bateaux de courses.
On imagine mieux Monet allant passer commande chez le père Fournaise ou Terrière, voire Vanneçon sur la rive d’en face.
Petit à petit les plans du nouveau bateau avaient pris forme. Le projet allait voir le jour.
Une victoire pour Paul, qui récemment blessé avait trouvé là un motif pour poursuivre le travail du bois qu’il aime tant.
Chaque détail avait fait l’objet de choix avertis. La nuance du vert de la cabine, la forme des portes et des fenêtres, tout était important.
Trouver le tissu rayé jaune et blanc du auvent avait été plus compliqué.
Il paraît que l’œil du patron de la voilerie Daniel à Vannes, s’était allumé lorsque Paul lui avait demandé s’il avait cela en stock. « Oui, j’ai! »
La touche finale appliquée, la mise à l’eau s’était faite en grandes pompes pendant les fêtes d’anniversaires de la naissance du peintre.
Il n’y a dans l’univers de Monet qu’une seule touche de noir, c’est la coque de ce petit bateau, passée au goudron.
Un bien joli yacht parmi ceux du Cercle de la Voile de Paris.