Virement de bord

Le dimanche 20 mai, jour de la première course des Régates de l’Exposition, il ne faisait presque pas un souffle d’air. À une heure de l’après-midi, on avait cependant tiré les bombes pour donner les signaux de départs de la course d’ensemble, et tous les bateaux inscrits, à une ou deux exceptions près, s’étaient mis en route.

Le rédacteur du journal Le Yacht, présent ce jour-là, relatait:

« La rivière, en ce moment, présente un aspect merveilleux et qui excite l’admiration de tous les spectateurs. Chaque série, en effet, reste groupée et compacte, et le bassin est rempli de bateaux qui tantôt se dépassent légèrement, tantôt se reforment en groupes suivant les caprices de la brise, en avançant lentement vers l’amont. »

Si le côté sportif laissait à désirer, le coup d’œil était impressionnant. Les spectateurs étaient sous le charme et les nombreux photographes s’empressaient de prendre des clichés.

Au passage de la première bouée, on remarque bien les bateaux encalminés. Les plus grands ont rattrapé ceux de la première série, les voiles se superposent et l’image est belle. On a le temps de noter les grands numéros noirs qui se détachent sur le blanc des cotons et simili-soie.

Il y a là, au premier plan Mamie, le 45, à Texier fils aîné. Derrière lui, le numéro 2 Fantlet, de Rouen, à Émile Sacré, puis le 1, le plus petit de la flotte, Plume-Patte, au vice-président Jean d’Estournelles et le 3, Souriceau, à l’allure plus moderne que les autres, à Maurice Monnot. Le 4, celui d’Henri, ne doit pas être bien loin, ou déjà loin devant. L’anglais Scotia, est aux aguets, favori et bien placé. On reconnaît tout au fond, Ariette à monsieur Rossolin, suivant le 36, Hébé à Maxime Desouches, lui-même distancé par CVA, le 34 à Texier fils aîné et le 22, Tornade à Mr Couture.

Curieusement, le nom de Texier apparaît plusieurs fois. Si l’on ajoute que François Texier était le dessinateur et le constructeur de Souriceau, le charpentier naval était très présent. Son nom était également écrit en toutes lettres sur la façade du nouveau chantier, proche du club-house. Belle opération publicitaire.

Les comptes-rendus des courses étant très succincts, il est difficile de savoir quel bateau il avait réellement barré. On le retrouve dans les résultats sous le nom Texier I, et son frère nommé Texier II.

Si le nom de Texier prend toute la place sur cette image, il y en a un autre, plus discret, mais très connu au Cercle: Desouches. Ce nom s’est affiché au palmarès de nombreuses compétitions, sur la Seine, en mer et à l’étranger. Plusieurs générations de régatiers ont mis ce nom à l’honneur.

Hébé, le Un-Tonneau de Maxime, courrait le plus souvent au Cercle d’Asnières-Argenteuil, le plan d’eau des petits bateaux, presque chez Gustave.